L’article précédent « DIRIGEANT D’ENTREPRISE FACE AUX RISQUES ET OPPORTUNITES DU 21ème SIECLE » décrit les pressions subies par les dirigeants d’entreprise de la part de leur famille, le marché, les collaborateurs, la règlementation et le monde de la finance, les poussant à affronter les défis majeurs liés aux crises écologiques, sociales, sanitaires et géopolitiques, sous forme de risques mais aussi d’opportunités.
Mais donc, pourquoi, alors que les entreprises ont un rôle majeur à jouer pour limiter en particulier les risques sociaux et écologiques, leurs décideurs ne s’impliquent en général pas à la hauteur des enjeux ? Quelles sont ces incohérences humaines et comment les corriger ?
Cause n°1 : le « bug humain »
La notion de « bug humain » est décrite par Sébastien Bohler, rédacteur en chef de la revue Cerveau & Psycho, dans son livre du même nom.
Selon sa thèse, nos actions incohérentes par rapport aux risques environnementaux répondent à de bas instincts, à des impulsions remontant à une période préhistorique, … ceux de notre stratium, une partie notre cerveau motivé par : manger, se reproduire, acquérir du pouvoir, du prestige, de la reconnaissance, récolter des informations, le plus possible et avec le moindre effort…
Cette caractéristique de notre cerveau est exploitée par certaines formes de publicité et acteurs du monde digital, ce qui provoque par exemple des achats et un usage des appareils électroniques fondamentalement non nécessaires, aux impacts sur la santé et environnementaux qui peuvent être désastreux.
Des managers au sein d’une entreprise sous l’emprise de ces impulsions cherchent dans leur choix de carrière ou leur décisions managériales à acquérir du pouvoir, du prestige et de la reconnaissance, ce qui est rarement compatible avec la sobriété et le désintéressement qui caractérisent un comportement écologiquement et socialement responsable. Et les meilleurs à ce jeu parviennent ainsi souvent à la tête des entreprises.
La solution : valoriser et développer dans l’entreprise (et ailleurs) la maîtrise de soi et la prise en compte de l’impact de nos actes sur la société.
Cause n°2 : les biais cognitifs
Les biais cognitifs sont utiles car ils nous permettent de porter un jugement ou de prendre une décision rapidement. Ils influencent nos choix, en particulier lorsqu’il faut gérer une quantité d’informations importante ou que le temps est limité. Il se produit ainsi une forme de dysfonctionnement dans le raisonnement pour aller à l’essentiel. Mais les biais cognitifs peuvent être un frein au changement de comportement nécessaire pour adresser des défis majeurs comme les crises écologiques.
Par exemple, un dirigeant d’entreprise sait que son activité professionnelle est nocive pour la préservation de l’environnement, mais sa priorité reste la croissance du profit de sa société, car donner priorité à l’écologie serait consommateur de temps, remettrait en cause beaucoup trop de choses et en plus, effet du bug humain décrit plus haut, serait négatif pour sa réputation de « businessman » … Donc, il continue son « business as usual ».
Pour atténuer cet effet négatif des biais cognitifs, nous devons sans cesse et avec délicatesse :
Informer sur les causes et conséquences des crises environnementales,
Vulgariser, par exemple par des atelier d’intelligence collective comme la « Fresque du Climat », pour faire comprendre les tenants et aboutissants de ces crises complexes,
Enfin, valoriser et provoquer des temps de réflexion et de prise de recul pour ancrer dans les esprits les vrais enjeux de la société et des entreprises.
Cause n°3 : les motivations personnelles liées au système de valeurs
La principale explication au manque d’engagement social et environnemental est révélée par le modèle de la Spirale Dynamique du professeur de psychologie américain Clare Graves. Selon ce modèle, les comportements des personnes et des organisations sont guidés par leurs Systèmes de Valeurs. Parmi les nombreuses caractéristiques d’un Système de valeurs, il y a la notion de motivation. Chez un individu et une organisation celle-ci dépend du Système de Valeurs dominant dans lequel il ou elle se trouve dans une période de sa vie. Ce Système de Valeurs, et donc sa principale motivation, peuvent évoluer au cours du temps sous l’influence de l’environnement (voir schéma ci-joint). Le Système de Valeurs dominant dans notre civilisation depuis la 2ème partie du 20e siècle a pour motivation chez les personnes la « réussite personnelle et l’acquisition de biens » et chez les organisations « être le meilleur, dominer la concurrence, quels que soient les moyens ».
Ce moteur du capitalisme a permis un fort développement économique avec beaucoup d’aspects positifs, mais aussi les effets négatifs que nous connaissons, comme la surexploitation des ressources, les pollutions et les inégalités. Ce Système de Valeurs dominant, ancré chez beaucoup de dirigeants et d’entreprises, explique leurs difficultés à changer radicalement de comportement et d’orientation, malgré leurs connaissances des risques.
Nous observons actuellement un éveil de conscience de nombreuses personnes et d’organisations dont la motivation se porte plus vers la responsabilité sociale et environnementale. Mais le changement de croyance, de façon de penser et de mode d’organisation ne se fait pas sans difficultés comme le symbolise le schéma ci-joint.
Contribuer à faire évoluer les motivations des personnes et organisations en les sensibilisant sur les risques et opportunités du 21ème siècle, en les expliquant et en montrant la voie pour passer à un Système de Valeurs plus adapté au nouveau paradigme. La Spirale Dynamique donne des clés pour cela. Voir : https://www.manager21.net/2017/09/spirale-dynamique.html
Autres causes
Un article de Florent Vairet (https://start.lesechos.fr/) liste d’autres causes :
- Survalorisation du risque de pertes par rapport aux gains potentiels.
- Système de décisions rapides et répétées prenant le dessus sur celui des décisions lentes et réfléchies.
- Tendance de notre conscience à sélectionner les informations qui nous rassurent et tend à rejeter celles qui nous remettent en question.
- Croyance que son action individuelle a un impact très limité sur le résultat final.
- Discours radicalement écologistes qui provoque chez certaines personnes l’effet opposé à celui recherché.
- Faible exposition des personnes à la souffrance des autres ou aux dégradations des écosystèmes.
- Esprit moutonnier.
Solutions :
Amener les dirigeants sur le terrain, au contact des personnes et dans la nature, là où les dégradations de notre société et notre écosystème se concrétisent pour qu’ils perçoivent et vivent la réalité.
Communiquer intelligemment, convaincre sans culpabiliser.
Encore une fois : valoriser et provoquer des temps de réflexion et de prise de recul pour ancrer dans les esprits les vrais enjeux de la société et des entreprises.
Qu’apporte IMWI dans ce contexte ?
Les membres d’IMWI sont sélectionnés pour leur compréhension des risques et opportunités auxquelles font face les entreprises, dans les domaines économique, social, sociétal et environnemental. Ils ont acquis et développent des compétences sur ces sujets et sont engagés dans la recherche de solutions pour les entreprises.
Ils peuvent donc apporter à leurs dirigeants l’éclairage nécessaire pour passer à l’acte et, en tant que manager de transition, prendre en main des projets concrets, comme le sourcing stratégique, la transformation industrielle responsable ou le changement de culture d’entreprise. Voir 4 cas concrets.
Lisez la suite dans « COMMENT AIDER LES DIRIGEANTS D’ENTREPRISES A ACCEPTER DE FAIRE FACE AUX DEFIS DU 21ème SIECLE ? »
Manager de Transition à Impact (IMWI)